Itinéraires, de Christophe Otzenberger
7 novembre 2007 par Bertrand Tavernier - Audiovisuel, Divers
Je me souviens que lorsque je suis sorti du cinéma après avoir vu Itinéraires (2006) de Christophe Otzenberger, j’ai été touché, ému, remué. Sa retenue, sa pudeur décuple l’âpreté du propos. Le regard qu’Otzenberger porte sur ce monde abandonné des dieux, livré à lui même, comme si la civilisation « c’était ailleurs, plus loin », est exempt de paternalisme comme de condescendance. Le trait n’est pas forcé ni la noirceur soulignée, au contraire. On conserve malgré tout une sorte d’espoir, de cet espoir qui vous fait tenir debout et continuer à marcher même quand le froid mord, quand les portes se ferment et qu’on ne peut se confier à personne. Formidable constat d’échecs que ce monde où la misère, le dégoût de soi vous lancent dans la violence ou le mutisme. L’ignorance, la difficulté d’établir de vrais rapports en dehors des dialogues d’ivrognes, tout cela parait miner les personnages, amoindrir jusqu’à leur instinct de conservation.
J’ai aimé la fièvre du film, son rythme syncopé, ces plans de regard qui reviennent comme si le personnage (et aussi les spectateurs) voulait se convaincre qu’il avait bien vu ce qu’il avait vu. Comme s’il avait envie d’emporter avec lui pour lui tenir chaud, un souvenir, une vision, un bout de mur, une femme derrière une fenêtre.
J’ai adoré les acteurs à commencer par Yann Trégouët. Mais aussi Spiesser, Hélène Vincent, Bonnaffé, Myriam Boyer et les autres. Sans oublier la petite Céline Cuignet qui aurait plu à Prévert.
Il est réconfortant pour le cinéma français qu’un tel film existe, mais désolant de l’avoir vu massacré par une sortie indigne.
Alors ruez-vous sur ce dvd (à paraître le 20 novembre). Christophe Otzenberger le dédicacera jeudi 15 novembre à partir de 18h à la boutique Chalet Pointu (10 rue des Goncourt – 75011 Paris).
Bertrand TavernierÂ
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