Récitatifs toxiques
10 janvier 2007 par Daniel Larrieu - Spectacle vivant
Le nouveau spectacle de Brigitte Seth et Roser Montllo Guberna est un concert théâtral dansé, genre peu fréquenté, qui demande de la part des interprètes les talents de danseurs et d’acteurs. La musique est jouée en direct par Jean-Pierre Drouet (acteur musicien) et l’ensemble « quam dilecta » qui nous fait découvrir Biber (1664-1704). Les textes, extraits de Crimes exemplaires de Max Aub sont une joyeuse compilation d’humour noir ou comment trouver normal de tuer son voisin, calmement, comme çà , sans raison particulière si ce n’est qu’il était différent ou gênant ou pénible ou insupportable, ou trop proche, ou trop moche ou trop quelque chose d’autre que soi.
Les personnages, tantôt à la barre du tribunal ou dans l’espace d’une scénographie très inspirée de Claudine Brahem, les danseurs acteurs évoluent pour nous raconter comment ils en sont arrivés là , si facile de zigouiller l’autre. Evocation poétique, du normal, la danse s’inscrit entre et pendant les récits. Pendant des allégories, naissent des gestes improbables, des situations terribles, des mises à  distance; le cri, l’effroi, le toucher, la violence. Le geste pousse au crime, dit-on, avec tremblements, mains sur la bouche, tressaillements, incompréhension.
Beaucoup de plaisir à voir les deux comédiennes auteurs se couper la parole, disant en même temps la même chose en espagnol et en français, ou accompagnées plus tôt de Jean Baptiste Veyret, déguisé en petite fille de bénitier, priant pour que le voisin soit éliminé car il ne pense pas la religion comme elles. Des situations insolites, le public rit souvent, pris aussi quelquefois par la beauté insolente d’une passacaille pour violon seul, nous renvoie à la musique sérielle américaine, boomerang des époques.
Un hommage au fantôme qui a préféré ne pas être nommé dans le programme et qui, dans sa robe noire, on l’a reconnu pour sa ressemblance avec l’assistante à la mise en scène, Dominique Brunet, évoque les grandes figures de l’ombre, discrète et bien marquante dans son geste précis. Et un autre à Jean-Pierre Drouet qui « percusionne » si justement le décor entier de son immense talent, de ses mains, tout simplement, et rythme notre bonheur.
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La danse ne passe ni souvent ni en grandes séries, alors vous avez jusqu’au 13 Janvier 20h30 pour aller voir ce spectacle au Théâtre de la Ville, Abbesses. www.theatredelaville-paris.com
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